Triathlète handisport française et kinésithérapeute, Annouck Curzillat est multiple championne de France de paratriathlon et médaillée de bronze dans la catégorie PTVI (déficients visuels) lors des Jeux paralympiques de Tokyo 2020. À l’occasion de la Semaine Olympique et Paralympique, nous l’avons rencontrée.
Mon kiné et moi. Bonjour Annouck et tout d’abord bravo pour votre performance aux Jeux Paralympiques ! Racontez-nous comment vous êtes venue au sport de haut niveau.
Annouck Curzillat : J’y suis venue un peu par hasard. Je dois bien avouer que ce n’est pas un rêve d’enfant ! Un jour, un guide m’a proposé de m’y mettre et tout a commencé. Je me suis entraînée, j’ai commencé à me mesurer aux parathlètes de haut niveau et je me suis entraînée encore davantage pour les égaler et les dépasser !
Mon kiné et moi. Comment vous organisez-vous pour vous entraîner ?
Annouck Curzillat : En ce moment, je suis en période de reprise. Je m’entraîne environ 8 heures par semaine (en préparation, c’est davantage 10-12h et beaucoup plus lorsque je suis en stage et que l’on multiplie les sorties vélo). J’alterne entre entraînement à la maison et à l’extérieur. En effet, lorsque l’on est déficient visuel, il faut ajouter au temps de l’entraînement celui de l’organisation. Je suis dépendante d’un guide pour pouvoir m’entraîner et il est souvent difficile d’en trouver un disponible durant la journée. Je dois aussi trouver des solutions pour me déplacer et aller sur les lieux d’entraînement. La part administrative est colossale et ce d’autant plus que de nombreux sites internet ne sont pas accessibles. Cela prend un temps fou dont je me passerais volontiers !
Toutefois, j’ai du temps pour m’entraîner car je travaille à 25% grâce à un contrat d’insertion professionnelle.
Mon kiné et moi. Qu’est-ce qui vous motive ?
Annouck Curzillat : Je me suis battue et je me bats pour obtenir ce que je veux, c’est à dire égaler les autres sportives et les distancier ! Outre cet esprit de compétition, je suis essentiellement motivée par la dimension sociale du sport. Quand je m’entraîne avec un guide, nous nous stimulons et encourageons mutuellement. J’aime les rencontres et le rapport avec le public également.
Mon kiné et moi. Comment avez-vous vécu les jeux paralympiques de Tokyo ?
Annouck Curzillat : Compte tenu du contexte sanitaire incertain, ce furent des jeux assez particuliers. Je me suis mise dans une espèce de bulle pour éviter le stress. J’ai aussi profité de mon statut d’outsider pour ne pas trop angoisser ! Nous avons eu la chance de pouvoir faire le stage de pré-adaptation, ce qui n’a pas été le cas pour tous les athlètes. De fait, j’ai assez bien vécu le tout, malgré un certain isolement assez pesant.
Mon kiné et moi. Quelles sont pour vous les valeurs olympiques ?
Annouck Curzillat : Les JO mettent en avant des valeurs fortes comme le partage et l’importance de l’effort. Pour moi, ils sont aussi un vecteur d’effacement des inégalités : tout le monde est dans le même bateau !
Mon kiné et moi. Pensez-vous que le regard du public sur les paralympiques s’améliore ?
Annouck Curzillat : Absolument ! Leur médiatisation s’améliore grandement et c’est très positif ! Le public est de plus en plus au rendez-vous et il se rend compte de notre engagement !
J’espère que cet engouement va inciter les clubs de sport à être plus inclusifs et permettre à des personnes handicapées de s’identifier et de trouver l’envie de faire du sport.
Mon kiné et moi. Avez-vous envie de transmettre les valeurs du sport ?
Annouck Curzillat : Tout à fait. J’ai déjà fait des interventions dans des établissements scolaires. J’ai envie de promouvoir le sport auprès de jeunes qui vivent dans des conditions difficiles, quelles qu’en soient les raisons. Je veux aussi leur dire que la différence est une source d’enrichissement.