Sophie HOUDAYER, kinésithérapeute, conseillère nationale et présidente du conseil départemental de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes du Maine-et-Loire (49), revient sur son expérience en tant que volontaire kinésithérapeute durant les Jeux Paralympiques qui se sont déroulés cet été à Paris.
Pourquoi avoir choisi d’être bénévole durant les Jeux Paralympiques de Paris 2024 ?
L’organisation recherchait des bénévoles et cela me tentait beaucoup : c’est un évènement exceptionnel, et en plus en France ! J’ai postulé comme tous les volontaires, en tant que kinésithérapeute, mais aussi dans le cadre de ma relation avec le sport puisque j’ai fait beaucoup d’escrime et j’encadrais parfois des petites compétitions.
J’ai finalement été sélectionnée parmi les 45 000 volontaires définitifs et on m’a proposé d’être kinésithérapeute volontaire sur plusieurs épreuves.
Comment s’est passée la sélection ?
Il y a eu 300 000 demandes en tout, et 45 000 personnes ont été acceptées. C’est l’organisation qui envoie un mail pour nous annoncer que nous avons été sélectionnés et nous demander si l’on accepte la mission proposée.
Est-ce que vous avez reçu une formation spécifique pour le Jour-J ? Comment cela se passe ?
Nous avons reçu des informations dès le mois de janvier, via des réunions en visioconférence. Nous avons également eu une formation académique sur la compétition et la façon de l’aborder. À l’approche de la date, la mission se précise. En tant que volontaire kinésithérapeute, je suis dans la partie médicale, avec des dossiers partagés pour le suivi des athlètes. J’ai personnellement démarré ma mission le 28 août, et le 26 nous étions en formation sur site afin de nous expliquer concrètement le fonctionnement du pôle médical.
Quel a été votre rôle durant les épreuves ?
Mes épreuves sont basées au Grand Palais, j’ai suivi les épreuves de taekwondo la semaine du 26 août, et la semaine du 2 septembre j’étais sur les épreuves d’escrime fauteuil. Pour les horaires, nous démarrons entre 7 heures et 10 heures le matin, puis nous terminons à la clôture des épreuves.
Concrètement, comment se déroule une journée en tant que volontaire kinésithérapeute ?
Sur les épreuves, nous sommes toute une équipe, souvent avec un seul kinésithérapeute. Il y a également des médecins, des médecins urgentistes, médecins du sport et infirmières. Les équipes purement médicales se répartissent sur le terrain qu’on appelle le FOP (Field of Play), où nous sommes vraiment au niveau des athlètes et au plus proche des actions !
Il y a également un pôle médical en dehors du terrain où les athlètes peuvent se rendre dans des petits box aménagés. Il y a aussi un pôle spécialement pour les spectateurs puisqu’il arrive qu’ils se fassent des entorses dans les gradins ! Personnellement, en tant que kinésithérapeute, je suis à 90% sur le terrain.
Durant les épreuves, ce sont les médecins qui m’appellent en m’informant qu’il faut que je me rende dans la zone d’échauffement faire un strapping par exemple, ou encore qu’un athlète s’est blessé et qu’il veut repartir, il faut alors strapper puis glacer.
On participe aussi au diagnostic lorsqu’un athlète est blessé, on me demande ce que j’en pense.
Est-ce que vous avez déjà dû intervenir directement sur un athlète ?
Oui, je suis intervenue auprès d’une jeune athlète grecque, il a fallu la strapper, mais dès qu’elle avait terminé son tour, il fallait retirer le strap pour mettre de la glace. Puis il fallait lui remettre le strap quand elle devait retourner sur le terrain et ainsi de suite !
Je me suis également occupée d’une visiteuse qui accompagnait un groupe d’enfants et qui s’est fait une entorse en sortant du métro. Elle s’est rendue au pôle médical où je l’ai strappée pour qu’elle puisse raccompagner son groupe.
Durant les épreuves de taekwondo on a aussi eu une fracture, un ligament croisé, un adducteur cassé…
Est-ce que c’est impressionnant de prendre en charge des athlètes de haut niveau ?
Oui c’est vrai que c’est impressionnant ! Ils veulent surtout rapidement retourner sur le terrain et on doit tout faire pour qu’ils puissent y aller le plus rapidement possible.
Par contre, c’est difficile pour ceux qui ont une blessure plus compliquée comme une fracture et qui ne peuvent pas continuer. Souvent ils s’effondrent : ce sont 4 années de travail qui s’envolent. Notre seul but, c’est de faire au mieux pour qu’ils gagnent !
Est-ce que vous intervenez également en amont et en aval de l’épreuve ?
Non, puisque les athlètes ont tous leur propre équipe. Nous intervenons uniquement sur le terrain, puisque leur staff n’a pas le droit d’y être : ils les accompagnent jusqu’à l’entrée de l’échauffement mais ils ne peuvent pas aller plus loin. Il n’y a que l’équipe des volontaires qui a le droit d’intervenir sur le terrain : cela limite les allers-retours et c’est plus sympa pour nous !
Comment décririez-vous l’ambiance générale en coulisses ?
On fait de très belles rencontres, hier soir par exemple, nous sommes tous partis au Club France après la compétition. Je ne vois pas beaucoup les autres kinésithérapeutes, on se croise, mais avec les autres volontaires médecins, infirmiers, on communique énormément, on échange toute la journée et ce sont vraiment des moments très riches puisque chacun vient avec son vécu.
Jusqu’à présent, qu’est-ce qui vous a le plus marqué ?
Je dirais les rencontres avec les sportifs. C’est exceptionnel parce qu’ils sont tous très gentils avec les volontaires et on a une très belle reconnaissance de leur part.