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Face aux pathologies de la prostate, le kinésithérapeute a un rôle essentiel de réassurance et d’accompagnement

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La Journée européenne de la prostate, organisée tous les ans le 20 septembre, est l’occasion d’informer largement sur les pathologies de cet organe, sur l’importance du diagnostic et sur les bonnes pratiques à adopter pour préserver la santé de son périnée. Guillaume CARNAUX, kinésithérapeute exerçant en pelvipérinéologie, explique pourquoi l’instauration d’une relation de confiance avec les patients est essentielle dans le cadre de ces pathologies qui touchent à l’intime.

Les pathologies de la prostate

Le cancer de la prostate est le cancer le plus répandu chez les hommes, avec près de 60 000 cas dépistés par an en France [1] et une moyenne d’âge de 50 ans environ au diagnostic. Sa prise en charge et son traitement ont fait d’énormes progrès ces dernières années, menant à une nette amélioration du pronostic. Le traitement chirurgical, lorsqu’il est envisagé, est généralement réalisé par cœlioscopie. L’accompagnement des patients est indispensable tout au long du parcours de soins, notamment en kinésithérapie, afin de favoriser une récupération optimale et une qualité de vie satisfaisante.

Une autre pathologie, assez fréquente chez les hommes de plus de 60 ans, est l’hypertrophie bénigne de la prostate (adénome prostatique), le gonflement de l’organe étant favorisé par l’avancée en âge. Elle peut être traitée par voie médicamenteuse et/ou chirurgicale selon les cas.

Guillaume CARNAUX, kinésithérapeute spécialisé en pelvipérinéologie, exerce au centre hospitalier de Roubaix et en libéral à Tourcoing. Il est aussi enseignant en institut de formation en masso-kinésithérapie à Lille, et président du conseil scientifique de l’Association française de rééducation en pelvipérinéologie (AFRePP) [2]. « Nous avons un rôle important de réassurance et d’accompagnement », explique-t-il. La majorité de ses patients sont des hommes atteints d’un cancer de la prostate, un adénome prostatique ou plus rarement, une prostatite.

L’information et l’éducation

« En premier lieu, le rôle du kinésithérapeute est primordial en matière d’information et d’éducation du patient. Puis il s’agit de l’aider à obtenir une maîtrise efficace de son périnée, à la fois avant et après l’intervention chirurgicale quand elle est envisagée, précise-t-il. Plus les patients sont informés et éduqués, plus leur récupération est satisfaisante ». Cet accompagnement comprend une préparation physique et respiratoire dont l’objectif est de regagner le domicile le plus rapidement possible après la chirurgie.

Tout au long du parcours, « un véritable travail d’équipe se met en place entre le patient, l’équipe d’urologie et le kinésithérapeute : chacun a sa part de responsabilité pour un rétablissement optimal ».

Généralement, le kinésithérapeute reçoit le patient un mois avant qu’il ne soit opéré puis une fois par semaine afin qu’il soit préparé le mieux possible à l’intervention. « Lors de la première séance, j’établis avec le patient un bilan de ses capacités respiratoires et physiques et je reprends toutes les informations essentielles sur le traitement, les possibles complications et les bonnes habitudes à prendre pour les éviter ou les diminuer », précise Guillaume CARNAUX. Dans ce cadre, la mise en place d’une relation de confiance est essentielle pour la suite de l’accompagnement.

Les principales complications du traitement chirurgical du cancer de la prostate sont l’incontinence urinaire et les troubles érectiles. Il est important de répondre aux questions ou aux inquiétudes du patient et de le rassurer : « Aujourd’hui, la chirurgie est mini-invasive, les conséquences des traitements sont mieux maîtrisées, avec une douleur moindre. En 6 mois, 80 % à 90 % des patients opérés d’un cancer de la prostate ont retrouvé une continence satisfaisante », explique le kinésithérapeute.

Une rééducation guidée

« Je contacte le patient deux à trois jours après le retrait de la sonde, pour prendre de ses nouvelles », précise Guillaume CARNAUX. La rééducation proprement dite débute un mois après. Il s’agit alors d’évaluer les complications et d’adapter précisément les séances en fonction de la situation du patient. « En cas d’incontinence, nous reprenons ensemble les conseils prodigués avant l’intervention : s’hydrater suffisamment, aller aux toilettes régulièrement, prévenir la constipation, pratiquer des exercices de renforcement du périnée et de synchronisation des sphincters selon l’effort fourni ». Parfois, des conseils simples peuvent aider à débloquer une situation. Par exemple, lorsque les fuites urinaires surviennent au moment du passage de la position assise à la station debout, il suffit bien souvent de penser à contracter le périnée juste avant de se lever. Apprendre à maîtriser son périnée consiste à obtenir un bon équilibre entre la contraction et le relâchement des muscles associés. Cela demande de s’entraîner régulièrement.

L’accompagnement comprend aussi un encouragement à la pratique d’une activité physique régulière, selon les capacités et préférences du patient.

La question de l’intimité

Lors des premières consultations, les patients ressentent souvent de la gêne car les pathologies de la prostate touchent à leur intimité et à leur vie sexuelle. Ils ont dû subir des examens médicaux inconfortables (toucher rectal, biopsie échoguidée) et appréhendent la rééducation. Or, il existe de nombreux moyens d’évaluation et de rééducation qui ne sont pas invasifs. « Je leur explique que le toucher rectal n’est pas toujours nécessaire pour que j’évalue la contraction du périnée. De même, l’emploi d’une sonde intrarectale n’est pas systématique », note Guillaume CARNAUX.

De même, les questions relatives à l’intimité et à la vie sexuelle sont quelquefois délicates à aborder avec le patient. Le kinésithérapeute peut proposer une consultation en couple afin que le dialogue soit facilité. Là encore, il s’agit d’informer et de répondre aux craintes formulées : par exemple, les troubles de la fonction érectile sont variables et peuvent être traités ; ou encore, l’impossibilité d’éjaculer, provoquée par la prostatectomie totale, ne veut pas dire absence de plaisir lors des relations sexuelles.

Une Journée pour sensibiliser le plus grand nombre

La Journée européenne de la prostate, le 20 septembre, est l’occasion de rappeler l’importance du dépistage. En effet, les hommes peuvent demander à leur médecin traitant de leur prescrire un dosage de PSA (antigène prostatique spécifique) dès l’âge de 50 ans, ou 45 ans en présence d’un facteur de risque, notamment un antécédent familial de cancer hormonodépendant : prostate, sein ou utérus. « Rappelons aussi qu’il existe sur le site de l’AFRePP un annuaire[3] des kinésithérapeutes pratiquant la rééducation pelvi-périnéale », précise Guillaume CARNAUX : une ressource précieuse pour les patients qui ont parfois des difficultés à trouver près de chez eux un kinésithérapeute exerçant dans ce domaine. Cette Journée est aussi l’occasion d’informer le plus grand nombre sur les pathologies de la prostate, sur les progrès réalisés dans les prises en charge, et sur les recommandations pour prendre soin de son périnée au quotidien [4].

Article rédigé à partir d’un entretien avec Guillaume CARNAUX, le 4 septembre 2024.

[1] Institut national du cancer. Panorama des cancers en France, édition 2023. https://www.e-cancer.fr/Expertises-et-publications/Catalogue-des-publications/Panorama-des-cancers-en-France-edition-2023

Note : concernant la prostate, les dernières données disponibles datent de 2018.

[2] https://afrepp.org/

[3] https://afrepp.org/annuaire/

[4] Booster sa santé en prenant soin de son périnée, https://www.ordremk.fr/wp-content/uploads/2024/08/cnomk-depliant-perinee-bat-digital.pdf

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